Quelles évolutions de la relation hôteliers – OTAs

Quelles évolutions de la relation hôteliers – OTAs

Cet article est de la prospective, il sort totalement de mon imagination et est basé sur aucune données réelles, mais simplement sur du bon sens et sur l’observation de la relation producteurs-distributeurs dans l’agroalimentaire. Avant tout, je tiens à préciser qu’il y a des distributeurs honnêtes, avec lesquels l’hôtelier à encore un partenariat, mais ce n’est malheureusement pas le cas des plus importants. Je ne nommerai aucune marque dans cet article, mais parlerai plutôt d’OTAs. Pour ceux qui sortent d’une grotte, une OTA est une Online Travel Agency, j’englobe aussi dans ce terme les IDS (Internet Distribution System). Il s’agit de plateformes sur lesquels l’hôtelier propose un stock de chambres à vendre. L’internaute réserve, l’hôtelier paye une commission sur le CA généré.

 

Pas de vente en direct

Les OTAs ont déjà partiellement verrouillé la distribution en imposant une parité tarifaire et une parité de distribution. Elles ont continué en noyant le point de vente direct de l’hôtel, son site, avec du référencement naturel et de l’achat de mots-clefs. Mais cela ne suffit pas. Il est fort probable qu’elles verrouillent encore plus en interdisant l’hôtelier d’avoir un moteur de réservation sur son site, voire même d’avoir un site internet tout court. Il est même probable que la réservation téléphonique devienne assujettie à une commission (ou soit taxée d’une manière ou d’un autre, y a pas de raison)

 

Paiement d’une marge avant

Pour être présent sur les sites des OTAs, il faudra probablement s’acquitter de frais de dossier, d’inscription. La traduction qu’elles font de votre fiche deviendra probablement payante, mettre plus de 10 photos sur sa fiche sera aussi une option payante, etc… Mais c’est surtout sur le prix de vente et sur le montant de la commission que la marge avant se fera le plus sentir (ce qui existe déjà). Pouvoir se commercialiser chez les OTAs coutera de plus en plus cher, attendez qu’elles rentrent toutes les formes d’hébergements, qu’elles renforcent encore leur domination totale et les règles du jeu vont vites changer, défavorablement pour vous.

 

Paiement d’une marge arrière

Y a pas de raison, si vous faites ce chiffre d’affaires, c’est grâce à eux, il vous sera lors demandé de payer, en plus de la commission, une commission sur le CA. Tous les ans, à clôture comptable, vous devrez reverser un pourcentage de votre CA et/ou de votre bénéfice (mais le CA, c’est mieux, c’est facile de ne pas avoir de bénéfice fiscal). Vous payez déjà une sorte de marge arrière, les chambres que vous avez mis en vente sur les OTAs qui ne sont pas vendues influencent négativement l’algorithme et donc votre classement sur la destination.
Je pense aussi que la commission sera perçue sur tout ce qui est vendu à l’hôtel, non seulement le petit-déjeuner, mais aussi la restauration, le spa, etc… je vous explique plus loin comment elles vont s’y prendre.

 

Un référentiel à adopter

Référentiel qualité mis en place par un site d'avis

Comme la grande distribution impose à ses producteurs un référentiel (taille et couleur des légumes, conditionnement, etc.), les OTAs vont petit à petit faire de même. Le but est de devenir une sorte de label de qualité ou du moins une garantie de sécurité. Vos chambres devront avoir telle taille, le pdj devra être comme ci, etc. Ne comptez pas être en vente sur les OTAs si vous n’avez pas d’ascenseur ni air conditionné. Les charges d’exploitation et rénovations vont exploser pour être présent sur ces circuits de distribution. Je vous ai mis en exemple (illustration) le programme EcoLeaders de TripAdvisor (ce n’est pas un distributeur), je pense que de plus en plus de plateformes vont mettre en place ce type de programme pour apporter une valeur ajoutée en plus.

 

Le contrôle du client, de l’image

Vous porterez un badge au nom de l'OTA

Le client ne vous appartiendra pas, c’est déjà le cas, ce n’est pas une nouveauté. Mais les OTAs vont aller beaucoup plus loin. Elles vont vous imposer de porter un uniforme OTAs avec un badge (vous savez là où il y a le nom des salariés) à leur marque, les serviettes en papier du pdj jusqu’aux produits d’accueil. Sans parler de la segmentation client effectuée par l’OTA et les surclassements, cadeaux, accueil vip qu’il faudra réaliser pour tel ou tel segment, à vos frais. Ce que vous pouvez faire, ce que vous devez faire avec le client sera décidé par l’OTA, des scénarios de comportement, de traitement de plainte, de chek-in/chek-out seront rédigés et vous devrez les appliquer.

 

Marque de distributeur

Le nom de votre OTA sur la façade

On se dirige clairement vers des marques de distributeur, les fameuses NDD, vous savez, maintenant vous acheter du fromage « Auchan », du dentifrice « Dia » et des sodas « Marque Repère ». Il va en être de même dans l’hôtellerie. Les OTAs vont apposer leur marque en devanture des hôtels et leur imposer tout un référentiel à respecter.
Pour devenir un NDD il faudra donner tout son stock, en permanence à l’OTA et ne pas avoir d’autre circuit de distribution, logique. Ne pas vendre en direct, sauf passage et téléphone (et encore, vous répondrez en citant l’OTAs, sur le principe du « Inter-Hotel de la Gare, Melissa à votre service, que puis-je pour vous ». Vous aurez l’obligation d’avoir du personnel trilingue, etc.
Pour la synchronisation permanente des disponibilités (pas des prix, les prix seront fixés, ailleurs, au siège, à Amsterdam, par exemple) il faudra utiliser le PMS de l’OTA. Vous aurez ainsi accès à la disponibilité de tous les autres NDD de l’OTAs et aurez l’obligation de vendre un nuit dans un autre établissement de l’OTA au check-out. C’est en imposant le PMS que l’OTA pourra prendre une commission sur tout ce qui est consommé par le client durant son séjour.

 

Participation au marketing

L’OTA dépense des sommes folles pour vous vendre, comme le font Leclerc, Auchan, etc. Ces derniers facturent des frais de catalogue et de toute action de promotion/marketing. Il en sera de même avec les OTAs, vous allez payer pour la visibilité (tête de gondole), ce que vous faites déjà en jouant avec le montant de la commission. Les OTAs ne vous pas se gêner pour vous facturer les adwords (achat mots-clefs dans Google) et autre (comme par exemple le fait d’apparaitre dans Google Hotel Finder). Il est même à prévoir que les OTAs facturent une participation au marketing, comme dans la relation franchisé-franchiseur. Tous les ans, vous aurez un pourcentage de votre CA (ou du CA réalisé sur l’OTA) à payer pour participation aux frais marketing.

 

En conclusion

Les OTAs vont devenir des supers chaînes hôtelières. C’est celui qui contrôle la distribution qui contrôle tout. Tous les commerces se concentrent dans ce sens : Decathlon à ses marques, Afflelou aussi, mon boulanger se nomme Banette maintenant, etc. Le distributeur prend toujours le pouvoir.

Les OTAs vont donc devenir des supers chaînes. Citotel, Inter-Hotel, BestWestern, Louvre, etc.. ont des gros gros soucis à se faire, même Accor (et je déconne pas).

 

Je vous propose de revenir lire cet article dans 3 – 4 ans et on fait un point sur ce qui s’est réalisé

Article inspiré par une publication sur mon mur facebook

Vous avez aimé cet article (la thématique, car aimé le contenu ….), alors je vous conseille les articles suivants: Pourquoi Booking est le meilleur et Pourquoi Booking n’est pas votre ami

 

7 Comments

  1. 9 août 2013 at 12 h 01 min

    En espérant que votre fiction ne devienne jamais réalité. Votre discours est, certes, argumenté mais bien pessimiste. Les MDD affichées dans les grandes surfaces ne réussissent pas à satisfaire tous les clients et tuer les marques de soda (coca) ou de dentifrice colgate... En espérant que je ne revienne pas dans 3-4 ans les bras ballants ! Bonnes vacances,

    1. 9 août 2013 at 13 h 34 min

      Hé hé
      Oui, cet article est volontairement violent et pessimiste, mais c'est clairement le chemin que cela prend. J'ai eu accès à une note interne d'un cabinet de notation boursière et, lui aussi, était très pessimiste sur le moyen terme concernant l'hôtellerie (et il ne parlait que des chaines, que des groupements en bourse)
      Il est clair que ceux n'ayant pas une vraie valeur ajoutée (emplacement/produit/prix) vont avoir de gros soucis.
      Effectivement les MDD n'ont pas tué Coca Cola, mais Coca Cola est historique, c'est la référence sur le marché, la marque porte des valeurs, etc... Les OTAs ne vont pas tuer ni le Ritz, ni le Crillon. Des chaines comme celle pour laquelle vous travaillez vont mourir, certaines vont survivre, celles à fortes valeur ajoutée (Relais&Châteaux, SLH, B&B) ont peut être un espoir, je suis désolé pour vous
      Je souhaite de tout mon cœur me planter et faire un Mea Culpa, ici même dans 3 ans
      Je souhaite surtout, que l'hôtellerie se fédère, se modernise, s'occupe de son produit, de ses clients, de sa commercialisation et reprenne la main. Par rapport à la grande distribution, le grand avantage de l'hôtellerie est qu'elle a le client en face d'elle, tous les jours et pas les OTAs

  2. Guillaume
    9 août 2013 at 18 h 01 min

    Aha! C'est marrant, j'ai récemment tenu presque le même discours à mon président il y a peu, en insistant sur les changements à faire, pour ne pas avoir, d'ici quelques années, à mettre une ensiegne Booking sur la devanture de l'hôtel. Cependant, il est très hasardeux de comparer l'hôtellerie et la grande distribution. Je pense au contraire que lentement mais sûrement, les OTA's vont perdre de leur poids dans le processus de réservation, mais concurrencée, non pas par les hôtels, mais par de nouveaux systèmes de distributon qui n'existent pas encore. Et aussi pour le simple que fait qu'un hôtel est un immobilier alors que les biens de consommation sont eux mobiles. Par exemple, si dans ma ville il y a un grève des producteurs et mon supermarché n'est alors pas livré en lait. Mais j'ai besoin de lait, donc je prends ma voiture et je vais dans la ville d'à coté. Par contre si je dois aller dans une ville et y passer la nuit, quoi qu'il arrive je ne pourrais pas aller dans la ville d'à coté pour dormir, ce qui donne plus de pouvoir aux hôteliers qu'aux producteurs agricoles par exemple; j'entends par là que je n'achète pas seulement une chambre d'hôtel, mais aussi une destination et cette achat est lié à un impératif qui ne peut pas être remplacé par une autre destination. Bref, très bon article comme d'habitude. Je reviendrais peut-être poster dans quelques temps, et sinon à coup sûr dans 3-4 ans :)

    1. 9 août 2013 at 21 h 00 min

      Effectivement, comme je le dis plus haut, contrairement à la grande distribution, l'hôtelier à le client en face de lui et ca, c'est ce qui va faire la différence (ou pas)
      Merci de votre fidélité Guillaume, faudra qu'on boive un verre pour refaire le monde hôtelier un de ces 4 ; )

  3. 18 août 2013 at 20 h 29 min

    [...] via Quelles évolutions de la relation hôteliers – OTAs » Artiref. [...]

  4. 23 août 2013 at 9 h 53 min

    Salut Thomas, Dans la série Grande Distribution et article d'il y a 3 ans, ton article me rappelle mon article de 2010 : www.hotelmarketing35.com/2010/10/26/10-points-communs-entre-la-grande-distribution-et-la-commercialisation-sur-internet( Je n'avais pas de boutons de partage à l'époque d'où les zéros au compteur !! ) L'article n'a pas trop vieilli, sauf sur les budgets pub! Je suis très intéressé sur ta prospective relative au fait que les OTA vont devenir sélective. Pour l'instant , elles ramassent vraiment tout ce qui passe, j'ai même vu récemment une caravane sinistre dans un jardin aux alentours du Mont Saint Michel présentée chez le leader de la réservation en ligne. De mon point de vue, ça dévalorise l'offre du site. Vont-ils poursuivre dans cette voie ? Rendez-vous en 2016 !

  5. Polain
    3 septembre 2013 at 15 h 10 min

    Tous ces sites nords américains profitent de l'incompétence (ou de l'ignorance) des hôteliers en matière de référencement et de stratégie marketing ou promotionnelle. Tous ces sites ont en ce moment une vingtaine de procès à venir en Europe. En 1970, on disait US GO HOME... et il est temps de reprendre le slogan et d'agir ! Mais nous vivons dans une société molle qui ne bouge pas ou peu...